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Lexique et enseignement du F.L.E.

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Lexique et enseignement du F.L.E.



Dans le monde entier, les spécialistes en éducation insistent sur la nécessité de mettre en place un enseignement globalisant qui prenne en charge à la fois la totalité de la personnalité de l'apprenant et une véritable coopération entre toutes les disciplines.

La finalité d'un tel enseignement consiste à développer l'autonomie de l'élève, à modifier son statut et son rôle dans l'apprentissage.

Il est bien évident que l'élève roumain d'aujourd'hui ne se ressemble plus à celui d'il y a quelques années. Ses besoins ont changé avec son univers d'attente, il vit déjà l'effet des miraculeuses transformations imposées par la nouvelle ouverture vers l'Europe occidentale. Par conséquent, les voies d'accès à l'apprentissage doivent changer également en conformité avec la personnalité de l'apprenant moderne.

Depuis bien des années, les spécialistes - linguistes, méthodologues, didacticiens et enseignants - s'évertuent à trouver les meilleurs moyens pour l'enseignement des langues, mais le domaine reste quand même ouvert à de nouvelles contributions.

Nous avons assisté aux efforts combien méritoires des structuralistes, des générativistes, des tenants des grammaires des cas, de la théorie de l'énonciation, du discours, des grammaires notionnelles, des pratiques interactives, textuelles, etc.

Nous avons vu naitre ces 'monuments' de la didactique du français, langue étrangère, qui sont : Le Français Fondamental Ier et IIème degré, le Vocabulaire Général d'Orientation Scientifique, l'Inventaire thématique et syntagmatique du français fondamental, Un Niveau-seuil du français, etc.

Redevables aux diverses orientations en linguistique théorique, ces ouvrages ont contribué pleinement à la réorientation de l'enseignement du français et notamment de l'un des compartiments de la langue (le plus important, peut-être), qui est le lexique.

Aujourd'hui le problème de l'enseignement du vocabulaire est de nouveau remis en cause, car les méthodes proposées par ces ouvrages et par tant d'autres, loin d'avoir épuisé le champ des recherches, invitent encore à la réflexion et permettent de nouveaux choix dans les voies à suivre.

1.1. L’enseignement du lexique, état des lieux

L’enseignement du vocabulaire, comme sous-domaine de l’enseignement du français langue étrangère, semble avoir retrouvé, depuis quelques temps, la place qu’il avait presque perdue au cours de années 80, où la didactique des langues avait déplacé l’accent, sous l’influence des modèles anglo-saxons, sur l’aspect communicatif de la langue.

Avec l’ouverture des nations européennes sur les questions communautaires, les enseignants disposent à présent, non seulement d’une nouvelle perspective sur l’enseignement des langues en général, mais aussi d’un outil important, un document émanant du Conseil de l’Europe, intitulé « Cadre Européen commun de référence pour l’apprentissage et l’enseignement des langues » . Ce document d’une certaine ampleur, est le résultat, comme il se définit en postface, d’une recherche menée pendant plus de dix ans par des linguistes de renom provenant de 41 États membres du conseil de l’Europe. C’est indiscutablement la plus importante contribution à l’avancement de la linguistique appliquée et de la didactique des langues vivantes. Cet ouvrage constitue une approche totalement nouvelle de l’enseignement des langues, une réévaluation des compétences, il a pour but de « stimuler la réflexion sur les objectifs et les méthodes, il facilite la communication et fournit une base commune pour la conception de programmes, d’examens, de diplômes et de certificats. Il favorise donc la mobilité éducative et professionnelle ». Formateurs et enseignants, concepteurs de programmes et auteurs de manuels, évaluateurs scolaires et universitaires y trouveront des coordonnées essentielles et des suggestions précieuses pour leur travail.

Avec cette nouvelle orientation on remet en cause la question de la sélection lexicale, les moyens mis en œuvre pour développer la compétence lexicale, enfin, en passant en revue la totalité du domaine, les auteurs tentent un inventaire qui se veut exhaustif des classes de mots ainsi que des expressions figées, séquences ou formules stéréotypées, etc. Dans cette masse de données, il n’y a qu’à choisir, selon ses propres points de vue et ses propres objectifs, la démarche à suivre.

1.2. La spécificité du lexique

Le lexique pourrait se définir comme la liste exhaustive des mots (ou des lexies) d'un état de langue naturelle

Pour mieux marquer sa spécificité, le lexique est couramment opposé à la grammaire. Cette opposition se fonde sur le caractère illimité de l'inventaire lexical face à la nature plutôt close du système grammatical Bien que les éléments grammaticaux possèdent, autant que ceux lexicaux, de signification, la fonction significative de ces classes d'éléments est toute différente. Ce n'est qu'aux éléments lexicaux que revient la fonction de dénotation (de désignation), c'est-à-dire la possibilité de s'appliquer à des entités de l'existence extralinguistique, à des faits  de l'expérience humaine. Aussi les éléments lexicaux acquièrent-ils une importance toute particulière. On ne peut exprimer un message que par le biais des mots porteurs de signification lexicale et même si l'on ignore parfois les 'règles' de grammaire, on arrive quand même à se faire comprendre, ce qui est le propre de l'échange verbal inter humain. Quel que soit le mécanisme grammatical qui sous-tend l'agencement d'un message linguistique (lire verbal), c'est par des mots que celui-ci s'exprime.

Qu'on l'appelle mot, monème, lexème ou lexie suivant les orientations linguistiques et le souci permanent de clarté, c'est cet élément porteur de sens lexical qui fera l'objet du présent cours.

1.3. Lexique et vocabulaire

Les mots s'organisent dans un ensemble pratiquement illimité d'éléments, toujours sujets à des renouvellements selon les transformations qui s'opèrent dans l'univers. Pour désigner cet ensemble, les ouvrages de spécialité se servent tantôt du terme ‘lexique’, tantôt du terme ‘vocabulaire’. Si l'on met souvent le signe d'équivalence entre les notions dénommées par ces termes, il y en a de ceux qui les opposent comme inventaire d'unités virtuelles, disponibles (le lexique) à l'ensemble d'unités réalisées dans un corpus, ou bien dans un texte (le vocabulaire). Ainsi, le lexique constituerait la totalité des éléments lexicaux d'une langue à un certain moment de son évolution, tandis que le vocabulaire serait l'actualisation d'une partie de ces unités dans un corpus . Si, dans bien des cas, cette distinction n'est pas opérante, elle devient pertinente en didactique des langues où l'on travaille sur des vocabulaires et non sur le lexique en général

Cela justifie pleinement, croyons-nous, les options terminologiques que nous entreprenons dans ce cours.

D'autre part, l'étude des vocabulaires et des méthodes propres à leur enseignement ne saurait être conçue en dehors des analyses effectuées au niveau du lexique. Les différents vocabulaires se trouvent inclus dans le lexique d'une langue et sont régis par les mêmes lois qui mettent ou qui mettraient) en œuvre le lexique en général. C'est donc toujours du lexique qu'il faut partir dans l'exploration du/des vocabulaire(s).

2. Niveaux d'analyse

Pour le chercheur qui s'aventure dans cette voie, la tache en est aussi difficile qu'attrayante. Il est difficile, en effet, de choisir entre les propositions d'une richesse absolument déconcertante les contributions scientifiques les plus pertinentes, enfin celles auxquelles rattacher ses propres avis. L'embarras vient de cela que le mot se trouve dans un réseau très riche de relations qui, toutes, sont censées apporter des éclaircissements à sa nature.

Le fonctionnement des lexèmes en tant qu'unités signifiantes nous apprend qu'il faut les considérer de plusieurs points de vue : syntaxique, sémantique, pragmatique, car la signification nait au carrefour de ces trois plans . En d'autres termes, on va tacher de surprendre l'intérêt méthodologique que suscite l'impact du lexique avec les trois composantes de la sémiotique conçue comme la théorie la plus générale des systèmes de signes, dont le système des signes qui composent la langue.

En même temps, nous serons amenée, par le truchement des relations entre les unités lexicales, relations très variées, à déceler les moyens propres à l'enseignement du lexique français, moyens qui se constitueront en autant de voies d'enrichissement du/des vocabulaire(s) des apprenants roumains.

L’angle d’approche du lexique le plus immédiat serait par le biais de la forme. L’accès au sens se fait, certes, par l’intermédiaire des mots. Mais comme les mots ne fonctionnent pas seuls dans les textes, il convient de s’intéresser aux grandes catégories grammaticales (noms, verbes, adjectifs, adverbes), à l’ordre canonique de la phrase (GN sujet + GV – verbe + compléments), aux diverses formes fléchies régulières en rapport avec une même forme lemmatisée, à l’identification et à la justification des formes irrégulières, au système verbal des modes et des temps.

Mais parler de forme, c’est aussi parler de dérivation lexicale, comme phénomène d’enrichissement quasi spontané de la langue. Dans le même sens et liée à la forme se situe la recherche étymologique qui peut être révélatrice à un certain niveau d’étude de la langue, bien qu’il soit privilégié plutôt l’aspect synchronique, actuel, de la langue aux dépens des démarches évolutives.

Une deuxième voie d’approche du mot, c’est sans doute par le biais de son contenu sémantique. C’est le domaine privilégié des dictionnaires qui renseignent sur le sens d’un mot inconnu en se servant de définitions, d’exemples, de contextes d’utilisation, de traits distinctifs, de relations sémantiques et de registres de langue, en fonction de leur type et de leur complexité. On est en présence de termes “techniques” comme dénotation, connotation, cotexte, contexte, sens propre, sens figuré, polysémie, synonymie, antonymie, métaphore, métonymie, etc. Ce sont des termes fonctionnels qui donnent une image de l’organisation interne du lexique d’une langue par classe d’objets.

On peut aussi aborder le lexique du point de vue de sa thématique. Cela suppose une approche en termes de rapports paradigmatiques et syntagmatiques qui délimitent le champ lexical d’un mot.

Plus récemment, le lexique semble s’orienter vers une approche syntaxique. Les dernières années ont vu apparaitre des laboratoires d’étude documentaire et linguistique, comme par exemple LLI de l’Université de Paris 13, sous la direction du professeur Gaston Gross qui met en pratique la recherche contextuelle du sens des mots, autrement dit, qui cherche à décrire le lexique du français à base de classes sémantiques . La définition des mots se fait sur la base de leur environnement, l’unité minimale étant la phrase simple . le projet consiste à décrire, l’ensemble des phrases simples du français en précisant, pour chaque emploi prédicatif, son schéma d’arguments, « les positions argumentales étant définies par les classes d’objets ». Vu sous cet angle, un prédicat connaitra autant d’emplois que de schémas d’arguments différents. Par voie de conséquences, les classes sémantiques qui en résultent reposeront sur une base syntaxique.

On voit donc qu’il n’y a pas qu’une voie d’approche du lexique d’une langue, tans sous l’aspect de la recherche linguistique, que de la linguistique appliquée à l’enseignement. L’acquisition du vocabulaire est un travail de longue haleine. Si la compétence syntaxique s’acquiert assez rapidement, surtout quand il s’agit de langues apparentées comme le roumain et le français, il n’en est pas de même pour la compétence lexicale. Celle-ci se forme dans le temps, avec un effort et un investissement considérables, autant de la part de l’enseignant que de la part de l’apprenant.

Préoccupée par les voies d'accès à l'apprentissage du vocabulaire français, nous nous servirons des acquis des théories sur l'énonciation, le discours et les approches textuelles les plus récentes.

« Peut-on ne pas être éclectique ? », se demandait J.-Cl. Chevalier, il y a une vingtaine d'années, dans un article portant le même titre La réponse, on la connait déjà. Au risque de marquer un nouveau point en faveur de cet éclectisme, nous oserons proposer certaines solutions appelées à faciliter l'enseignement du vocabulaire et à le rendre plus efficace.

À lire absolument :

Jean-Claude Rolland, L’enseignement du vocabulaire en classe de français langue étrangère, 2005, https://www.edufle.net/L-enseignement-du-vocabulaire-en,169

Cadre européen commun de référence pour les langues https://culture2.coe.int/portfolio/documents/cadrecommun.pdf

Elizabeth Calaque, Jacques David, Didactique du lexique : Contextes, démarches, supports, coll. « Savoirs en pratique », De Boeck, 2004.

Evelyne Bérard, L’approche communicative : Théorie et pratiques, coll. « Didactique des langues étrangères », collection dirigée par Robert Galisson, Clé International, France, 2001.

Claire Miquel, Vocabulaire progressif du français 3, niveau avancé, Clé International, 1999.

Jacqueline Picoche, Didactique du vocabulaire français, Nathan, Paris, 1993, https://www.jacqueline-picoche.com/dfu.htm.



G. Gougenheim et collaborateurs, L'Elaboration du français fondamental (Ier degré), Paris, Didier, 1964 ; Vocabulaire Général d'Orientation Scientifique, Paris, Didier, 1971. R. Galisson, Inventaire thématique et syntagmatique du français fondamental, Paris, Hachette, 1971. D. Coste et collectif, Un niveau-seuil de français, Strasbourg, 1976.

https://culture2.coe.int/portfolio/documents/cadrecommun.pdf

A.J.Greimas, J. Courtès, Sémiotique. Dictionnaire raisonné de la théorie du langage, Paris, Hachette, 1979, p.210.

A. Martinet, Eléments de linguistique générale, A. Colin, Paris, 1970, p.19.

Cf. A. J. Greimas, J. Courtès, œuvre citée, passim, et A. Martinet, œuvre citée, passim.

T. Cristea, 'Cotext si context in predarea vocabularului', in Limbile moderne in scoala, vol.II, 1984, pp.11-12.

T. Cristea, art. cité, pp.11-12.

M. Tutescu, Précis de sémantique française, Editura Didactica si Pedagogica, Bucuresti, 1979, pp.9-10.

Laboratoire de Linguistique Informatique

Classes d’objets.

https://www.lli.univ-paris13.fr

J.-Cl. Chevalier, 'Peut-on ne pas être éclectique ?, in FDM, no.129, 1977, pp.66-71.



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