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LES REFLEXIONS CIORANIENNES DANS L’ESPACE DE LA PHOLOSOPHIE MODERNE

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LES REFLEXIONS CIORANIENNES DANS L’ESPACE DE LA PHOLOSOPHIE MODERNE

L’influence du romantisme allemand



« Amoureux des sommets, puis déçus par eux, nous finissons par chérir notre chute, nous nous hatons de l'accomplir. »[1]

Influencé par les romantiques allemands, par Schopenhauer, par Nietzsche et par la Lebensphilosophie (Schelling, Bergson), comme par les russes Chestov, Rozanov ou Dostoïevski, ou par le poète roumain Eminescu, Cioran écrit dans un style lyrique, expansif, des méditations souvent d’ordre métaphysique, dont les thèmes récurrents sont la mort, le désespoir, la solitude, l’histoire, la musique, la sainteté et les mystiques (Des Larmes et des Saints, 1937) – thèmes que l’on retrouvera dans son œuvre française. Dans son livre controversé (La Transfiguration de la Roumanie, 1937), Cioran, alors proche du mouvement légionnaire, critique violemment son pays et ses compatriotes, en opposant aux « petites nations », méprisables du point de vue de l’histoire universelle, comme la Roumanie, les grandes nations, comme la France ou l’Allemagne, nations qui ont leur sort entre leurs mains. Arrivé à Paris en 1936, après deux ans passés en Allemagne, il continue tout d’abord à écrire en roumain, jusqu’au milieu des années 1940 (1943 est l’année de son dernier article roumain, et des premiers en français), la rupture définitive se produisant à l’été 1946, alors qu’il essaie de traduire Mallarmé en roumain : il décide brutalement de renoncer à sa langue maternelle, puisque personne à Paris ne la parle, et se met aussitôt à rédiger son premier livre en français, lequel, à force de réécritures intenses, va devenir l’impressionnant (Précis de décomposition, 1949), premier d’une série de dix livres dans lesquels Cioran continue d’explorer ses obsessions de toujours, avec un recul croissant qui le rapproche à la fois des sophistes grecs, des moralistes français et des sages orientaux, notamment bouddhistes. Il écrit ses vitupérations existentielles et autres considérations destructrices dans un français classique, qu’il ressent comme aux antipodes de la souplesse de la langue roumaine, et dont il parle comme d’une « camisole de force » l’obligeant à contenir son tempérament extrême et ses envolées lyriques. Ses livres de désillusion radicale paraissent à un rythme décroissant, sur plus de trois décennies, tandis qu’il s’isole, avec sa compagne Simone Boué, dans une minuscule mansarde au cœur de Paris, en spectateur toujours plus replié sur son propre moi, et toujours plus distant d’un monde qu’il renie tant sur le plan historique (Histoire et Utopie, 1960) qu’ontologique ( La Chute dans le Temps, 1964), élevant sa misanthropie jusqu’à des cimes de subtilité ( De l’inconvénients d’être né 1973 ), non sans laisser poindre ici et là un humanisme tout d’ironie, d’amertume et de préciosité ( Exercices d’admiration, 1986; Cahiers, publication posthume).

Interdit de séjour en Roumanie jusqu’à la chute du régime communiste, n’ayant connu une consécration internationale que tardive, il meurt en 1995 à Paris. Selon certains critiques, la plupart des œuvres d’Emil Cioran s’adressent à la catégorie des individus faibles ou ratés ayant l’impression que leurs vies se résument à une perte infinie de soi-même. Son ambition a été toujours de conquérir  la communauté des exclus, des dépressifs qui étaient capables de mettre fin à leurs existences misérables dans un seul instant.

Toutefois, Cioran appréciait que la vie était déplorable, une sorte de maladie. Ainsi, le suicide représente une manière de rendre la vie supportable. Il n'a jamais encouragé cet acte comme une solution concrète. Il voyait le suicide plutôt comme une solution abstraite : « Je passe mon temps à conseiller le suicide par écrit et à le déconseiller par la parole. C'est que dans le premier cas il s'agit d'une issue philosophique ; dans le second, d'un être, d'une voix, d'une plainte » .

En effet, on parle d’une gigantesque différence entre la joie amenée par l'idée que nous puissions sortir de la vie quand bon nous semblera et le fait de réellement mettre fin à ses jours. Utilisant d’autres mots, cette pensée du suicide était pour lui comme une façon de passer au travers de la vie : c'est l'idée du suicide rendant la vie agréable en nous faisant comprendre que le suicide reste une solution finale au cas où notre vie serait totalement inacceptable. Être enchainé dans la vie, ne serait-ce pas la pire des cruautés ? De plus, Cioran considérait que de toute façon «ce n’est pas la peine de se tuer puisqu’on se tue toujours trop tard.» Nous finissons notre existence exactement dans le moment erroné : « Pendant des années, en fait pendant une vie, n'avoir pensé qu'aux derniers moments, pour constater, quand on en approche enfin, que cela aura été inutile, que la pensée de la mort aide à tout, sauf à mourir! »

Lors de la seconde période d’étude à la Faculté de philosophie de l’Université de Bucarest, le jeune Cioran consulte le livre de George Mehils, Le Romantisme allemand. Comme suite, il reconnait notamment dans les entretiens avec Jean – François Duval, l’influence marquante de ce courant le long de sa jeunesse :

Je me suis senti trés proche du romantisme allemand surtout dans ma jeunesse. Et même actuellement je ne puis pas dire que je m’en suis complètement détaché. Le sentiment fondamental chez moi, le weltschmertz, l’ennui romantique, je ne m’en suis pas guéri. Je me sens beaucoup moins romantique que dans ma jeunsse forcément. Mais le point de départ c’était ça : j’étais marqué dans ma jeunesse par le romantisme allemand par toute forme de romantisme, même le romantisme français.[3]

Dans La Transfiguration de la Roumanie, Cioran mentionne également la grande contribution des philosophes romantiques allemands à la formation de l’histoire de ce pays :

Avec Schelling, Novalis, Hegel et Schlegel, l’Allemagne s’est déléctée dans ses profondeurs et a tatonné ses contours. Le romantisme allemand, beaucoup plus que tout autre moment de l’esprit européen, justifie d’une manière définitive la participation à l’histoire. Un si grand rêve de l’esprit compense la trivialité de siècles de pensée et de vie. Le romantisme allemand c’est l’auto–extase de l’esprit dans la fini.[4]

Toutefois, on reconnait le fort désir de trouver un style semblable à celui promu par le romantisme allemend. Cioran même confesse dans un entretien avec Hans – Jürgen Heinrichs qu’il a toujours cherché un « soi » dans les livres que dans l’expérience personnelle.

Schopenhauer et Cioran, deux penseurs similaires

L’influence du pessimisme schopenhaurien est annoncée par Cioran pour la première fois dans le passage suivant :

Cela me génèrait de me voir atribuer le nom de disciple de Schopenhauerou de Nietzsche.

Ces mots rélèvent clairement l’existence d’une théorie proche de celle allemande. En fait, dès son commencement, la culture roumaine moderne a été posée sous l’empire de la philosophie ci-dessus mentionée. Le critique littéraire, Titu Maiorescu, délimite cette réalité par le biais du groupe culturel Junimea et la révue Causeries littéraires.

D’autre part, Cioran même affirme dans les douze lettres de jeunesse adressées à Bucur Tincu que la lecture des textes appartenant à Schopenhauer ont lui provoqué la non volonté de vivre :

Il y a une tendance originelle et fondamentale, engendrée par le fait de s’illusionner de manière impérialiste, ce dont très peu se rendent compte.[6]

Ces lettres témoignent également le fou caractère de la réalité dans laquelle Cioran a mené sa vie.

D’ailleurs, une de ces lettres résume son essai Les révélations de la douleur :

J’avais essayé de montrer que la destinée individuelle, en tant que réalité intérieure, irrationnelle et immanente, ne se révèle à nous qu’a travers la douleur, que celle – ci est la seule voie positive qui puisse mener à la compréhension intérieure des problèmes personnels.

Pour continuer, les termes utilisés le long de cet essai prouvent l’incontestable savoir de la philosophie schopenhauerienne :

On ne doit pas concevoir l’infini de la douleur à la manière de ce pessimisme qui tente de postuler la supériorité quantitative de la douleur par rapport au plaisir. Loin de nous l’intention de nous servir d’une balance dans un domaine si intime et si étrange. Il est sûr plutôt que probable que la douleur est plus fréquente que le plaisir. Mais ce que importe n’est pas cette estimation quantitative, mais l’intensité qualitative de vécu. Or, de ce pont de vue tout s’avère être limité, sauf la douleur qui est illimitée.

On doit noter également que une confession retrouvée parmi une de ces lettres  Il y a en peu de mon age qui sachent ce que signifie la maladie et la douleur” montre un fort contrast avec l’idéologie de Schopenhauer :

Il serait bon de comparer une fois de sang froid la somme des joies avec celle des souffrances possibles dans l’existence d’un homme. Je crois que la balance serait bientôt faite. Mais au fond il est parfaitement superflu de se disputer pour savoir si c’est la somme du bien, ou celle du mal, qui l’emporte dans ce monde, vu que l’existence du mal suffit à elle seule à trancher la question ; un mal, en effet, ne peut être ni effacé, ni compensé par un bien qui l’accompagne ou le suit.

Tout d’abord, Cioran crée dans Sur les cimes du désespoir, un conflit entre l’intellectuel organique et celui abstrait. Le penseur organique considère que ”les vérités sont vivantes, fruit d’un tourment intérieur et d’une affection organique”[10], et que la refléxion ”garde une saveur de sang et de chair” . L’intellectuel abstrait estime que les méditations naissent d’une ”spéculation inutile”.

Pour Cioran la vie est synonyme à une source de maladies, ainsi que de douleurs :

Le malheur d’être incapable d’états neutres autrement que par la réflexion et l’effort. Ce qu’un idiot obtient d’emblée, il faut qu’on se démène nuit et jour pour y atteindre, et seulement par à –coups!

En revanche, Schopenhauer juge la vie comme une simple volonté. Toutefois, les deux s’accordent à l’idée que l’individualisme génère la souffrance.

Pour Cioran, le pessimisme est en fait un effet de balancier qui le conduit, lui personnellement, de l’Extase à l’Ennui ; ce type de pessimisme peut être résumé par cet extrait d’aphorisme:

Je n’ai jamais lu un sermon de Bouddha ou une page de Schopenhauer sans broyer du rose.[14]
Cette dernière expression est la preuve même que ce pessimisme n’est pas un nihilisme, que dans le “néant” ou la douleur de l’Ennui on peut re-trouver la lumière et la Joie de l’Extase.

Entre le “nihilisme” et le “mysticisme”, entre l’Ennui et l’Extase, entre deux extrêmes, il existe un point médian, une troisième voie, pessimiste car incapable de foi, de cette croyance qui permet de s’accrocher justement à l’un de ces extrêmes :

Entre l’Ennui et l’Extase se déroule toute notre expérience du temps.

Entre la naissance et la mort, cette vie « donc oscille, comme un pendule, de droite à gauche, de la souffrance à l’ennui […] » et, le seul sens que l’individu peut lui donner, c’est de trouver un moyen de remplir ce vide. Pour certains, comme Nietzsche, cette affirmation est la preuve du nihilisme et il vaut mieux vivre, donc passer inlassablement des désirs à assouvir à leur satisfaction bien terne, que de s’enfoncer dans une existence molle, décadente ou malade. Selon Schopenhauer et Cioran, la vie de la majorité des humains n’est pas aussi merveilleuse et extraordinaire que chacun aime se le conter. La plupart des hommes porte le « fardeau de l’existence » et leur seule préoccupation est de « tuer le temps », donc fuir l’ennui de la vie. L’ennui est le principe même de la sociabilité humaine, bien que les hommes soient des loups entre eux.

Comme le besoin pour le peuple, l’ennui est le tourment des classes supérieures. Il a dans la vie sociale sa représentation le dimanche ; et le besoin, les six jours de la semaine.

Et avec humour, il relève même qu’il est à l’origine des divertissements humains, comme les jeux de cartes, dont le succès « met à nu le côté misérable de l’humanité. »

Extase et Ennui forment deux types de vie que décrit aussi Schopenhauer, selon des principes Hindous. La première est une vie de pure connaissance, la contemplation des Idées, privilège réservé à l’intelligence affranchie du service de la volonté » ; la seconde est « la léthargie la plus profonde de la volonté et de l’intelligence au service de la volonté, l’attente sans objet, l’ennui où la vie semble se figer . La vie de la majorité des individus est un composé de ces deux vies car il est bien difficile de se maintenir dans l’un des extrêmes.

Vraiment, on a peine à croire à quel point est insignifiante, vide de sens, aux yeux du spectateur étranger, à quel point stupide et irréfléchie, de la part de l’acteur lui-même, l’existence que coule la plupart des hommes ; une attente sotte, des souffrances ineptes, une marche titubante à travers les quatre ages de la vie, jusqu’à ce terme, la mort : en compagnie d’une procession d’idées triviales. Voilà les hommes : des horloges ; une fois monté, cela marche sans savoir pourquoi ; à chaque engendrement, à chaque naissance, c’est l’horloge de la vie humaine que se remonte, pour reprendre une petite ritournelle, déjà répétée une infinité de fois, phrase par phrase, mesure par mesure, avec des variations insignifiantes.

Pour Cioran, l’Ennui est davantage qu’un dimanche après-midi en famille et surtout davantage qu’un état de vie que la majorité des individus tente de fuir. C’est une expérience à la fois cause et effet de la lucidité sur le monde. Ce n’est pas un Salut :

Tout ce que nous poursuivons, c’est par besoin de tourment. La quête du salut est elle-même un tourment, le plus subtil et le mieux camouflé de tous. [20]

L’ennui de soi - conscience quasi émotionnelle du passage du temps. Pourtant, selon Bouddha, l’Eveillé est également celui qui vit chaque instant comme un point sans cause ni effet. Cioran serait-il un Bouddha raté ? La Conscience, dans l’Hindouisme et le Bouddhisme est le moment précis de l’unité Brahman-Atman, c’est-à-dire la Conscience de soi et par là la Conscience de l’Etre. A ce moment, l’Eveillé est en retrait, pur repos des pensées, des actes et des paroles. La conscience permet le contrôle du flot incohérent et douloureux des pensées et introduit le repos dans l’inquiétude infinie. La pensée peut-être un vertige de soi ; le repos est-il alors un ennui ? Certes, oui, du point de vue de l’impossibilité d’action. Le Soi indien est cette conscience détachée du monde et surtout une expérience précise.

L’ennui selon Cioran est l’expérience d’une horreur, celle de vivre des jours et des heures qui s’écoulent sans arrêt et qui reviennent à la charge, sans jamais, eux, se lasser de couler. Les saisons se suivent avec leurs cortèges de cérémonies obligées, de seuils temporels toujours identiques. C’est un quotidien bien profond et trop lucide qui donne la nausée. Ce serait comme un manège où la plupart des hommes sont heureux de tourner et de revoir perpétuellement le même paysage autour d’eux, jusqu’à ce que la mort les prenne. C’est une succession d’instants sans liens, de sauts dans le temps qui n’a rien d’inconnu, dans un décor de carton pate des plus fade. L’ennui est alors cette envie de descendre du manège, ne serait-ce qu’un instant ; et se retrouver avec les dieux qui contemplent le spectacle, comme des parents avisés, au pied de l’attraction.
L’ennui de soi est la conscience de cette vacuité du moi qui est une étrange sensation. C’est l’impression qu’entre le désespoir, la mélancolie, et la joie, la béatitude d’exister, il n’y a pas à choisir. Parce qu’au fond de ce moi, il n’y a qu’un vieux serpent flasque qui renifle en se retournant pour changer de position en dormant. Et si seulement, crie Cioran, il y avait la consolation de la foi. Mais pour le “salut”, il reste la musique qui, faisant écho au passage sinistre des instants, annihile la sensation du vide, comme le choc improbable de la matière et de l’anti-matière.

Le passage du temps et surtout la conscience de ce passage est l’expérience la plus douloureuse dans l’Ennui, car elle nous rappelle à la fois notre existence et notre déchéance :

Trois heures du matin. Je perçois cette seconde, et puis cette autre, je fais le bilan de chaque minute. Pourquoi tout cela ? Parce que je suis né. [21]

Ce qui devrait être le cadeau de l’Eveil, cette conscience de la présence du temps, la conscience entière du présent, devient pour Cioran la torture de l’insomnie car elle n’est pas joyeuse.

Le passage pur du temps, le temps nu, réduit à une essence d’écoulement, sans la discontinuité des instants, c’est dans les nuits blanches qu’on le perçoit. Tout disparait. Le silence s’insinue partout. On écoute, on n’entend rien. Les sens ne se tournent plus vers le dehors. Vers quel dehors ? Engloutissement auquel survit ce pur passage à travers nous et qui est nous, et qui ne finira qu’avec le sommeil ou le jour.

Dans l’éveil insomniaque il existe comme une pale image de l’Eveil de Bouddha dans la méditation. La méditation est cet état où les objets de l’extérieur n’existent plus car il n’y a plus de différence entre l’extérieur du monde et l’intérieur du sujet méditant. Nous sommes le temps qui passe, le pur présent dans la conscience des instants qui se succèdent. Pourtant l’éveil de Cioran est une douleur car il n’est pas souhaité et il n’est pas vécu dans les conditions de la méditation bouddhiste. Il s’impose par l’absence de sommeil et la torpeur de la nuit.

L’éveil de l’insomnie comme l’eveil de la méditation ne sont pas des états indifférents, ce sont des extrêmes dans la vie humaine. Ils ne sont pas voulus par l’individu, mais le résultat d’une “grace” transcendante. Car bien que douloureux, l’éveil de Cioran est ce qui lui permet de comprendre le monde pour en acquérir sa lucidité pessimiste.

e “profane” pourrait trouver que cette conscience du temps est un don, car elle est l’aiguillon du présent. Seulement, même si ce sont des poisons, le souvenir du passé ou l’espoir de l’avenir permettent aussi à l’homme d’oublier cette fuite qu’est également le présent. On nous dit que le Sage est celui qui justement ne se fie pas à ces deux illusions temporelles. Qu’est-ce donc que le temps pour le pessimiste ?

Chaque instant de la durée, par exemple, n’existe qu’à la condition de détruire le précédent qui l’a engendré, pour être aussi vite anéanti à son tour ; le passé et l’avenir, abstraction faite des suites possibles de ce qu’ils contiennent, sont choses aussi vaines que le plus vain des songes, et il en est de même du présent, limite sans étendue et sans durée entre les deux.

Le temps est l’un des principes de la raison suffisante et par là, il n’appartient qu’à la sphère de la représentation ; la volonté comme chose en soi n’a rien à voir avec le concept temporel. Ce n’est que par la succession des objectivations de la volonté qui veut exister à tout prix et éternellement, que la notion de temps a un sens. L’avenir et le passé, tout comme le présent, ne sont rien du point de vue de la chose en soi. Mais pour nous, pauvres mortels, ils sont notre bulle dans laquelle nous agissons illusoirement. La connaissance intuitive d’un tel vide est, en soi, une délivrance du monde-là ; mais c’est aussi une douleur :

Il existe une connaissance qui enlève poids et portée à ce qu’on fait : pour elle, tout est privé de fondement, sauf elle-même. Pure au point d’abhorrer jusqu’à l’idée d’objet, elle traduit ce savoir extrême […] : de pouvoir répéter, en chaque rencontre, qu’aucun geste qu’on exécute ne vaut qu’on y adhère, que rien n’est rehaussé par quelque trace de substance, que la “réalité” est du ressort de l’insensé. […] “C’est déjà du passé”, dit-il de tout ce qu’il accomplit, dans l’instant même de l’acte, qui de la sorte est à jamais destitué du présent.

La « chute dans le temps », comme la chute de l’homme du jardin d’Eden, permet de se libérer du voile de Maya, qui cache le vide du passé, du présent et de l’avenir : c’est la Connaissance. Mais elle désagrège aussi, par la même voie, le peu de consistance de l’instant qui alors se succède à lui-même, avec le même vide, où l’acte est insensé. L’ennui devient une déception automatique : le présent ne porte plus aucun fruit.
il voit seulement les heures passer - ce qui vaut mieux qu’essayer de les remplir.

Le sentiment d’ennui se combat par la volonté assoiffée de remplir chaque instant et se définit par la peur tenace de se laisser aller au vide de l’existence dont on est parfaitement lucide. L’ennui colle aux basques, c’est une malédiction qui est pourtant la conséquence d’une grace ; il va de pair avec l’extase libératrice et joyeuse. La peur de l’Ennui est comma la peur du dentiste, cette crainte de la douleur avant même qu’on ne la ressente ; c’est une peur tellement humaine que l’imagination a priori n’a pas vraiment besoin d’expérience pour savoir ce qu’elle est. L’ennui est la douleur ou la tare de celui qui, ayant compris, refuse de se laisser aller à la vacuité.

Quand on a pratiqué les contrées où l’oisiveté était de rigueur, où tous y excellaient, on s’adapte mal à un monde où personne ne la connait ni ne sait en jouir, où nul ne respire. L’être inféodé aux heures est-il encore un être humain ? Et a-t-il le droit de s’appeler libre, quand nous savons qu’il a secoué toutes les servitudes, sauf, l’essentielle ?

D’où vient l’ennui ? De l’angoisse, particulièrement de l’angoisse insomniaque.
« L’ennui est bien une forme d’anxiété, mais une anxiété purgée de peur. Lorsqu’on s’ennuie on ne redoute en effet rien, sinon l’ennui lui-même.»
L’angoisse n’est pas “existentielle” ni essentielle, au contraire, elle serait même plutôt provocatrice et fière. Elle est provoquée par la lucidité de la vision juste du monde qui déstabilise les croyances et ne permet plus au penseur de s’assurer de rien et de se rassurer du monde extérieur. Seule la peur de voir les illusions du monde définitivement s’effondrer le tient encore vivant. C’est la peur du vide, un vertige métaphysique, un vertige de la pensée qui s’effondrerait avec le Tout.

Cette anxiété est donc intimement liée à la marche du monde, elle est presque inévitable pour celui qui commence à s’interroger, à poser des questions, à douter :

L’anxiété, loin de dériver d’un déséquilibre nerveux, s’appuie sur la constitution même de ce monde, et on ne voit pas pourquoi on ne serait pas anxieux à chaque instant vu que le temps lui-même n’est que de l’anxiété en pleine expansion, une anxiété dont on ne distingue le commencement ni la fin, une anxiété éternellement conquérante.
Pour résumer cet aphorisme, on pourrait parler, comme aujourd’hui, d’un monde “anxiogène”, d’une pathologie de l’angoisse inhérente à la modernité et au monde-là, monde de souffrances.

Dans la Chute dans le temps, tout au début de l’ouvrage, Cioran définit cette angoisse comme liée à la connaissance de l’homme de son destin tragique. Notre véritable nature serait d’être ignorant, comme dans le jardin d’Eden. La Connaissance fait de l’homme un inadapté exténué et cependant infatigable, sans racines, conquérant parce que précisément déraciné, un nomade ensemble foudroyé et indompté, avide de remédier à ses insuffisances, et devant l’échec, violentant tout autour de lui, un dévastateur […].

La peur née du tragique de l’existence et de l’angoisse des illusions est la pierre d’achoppement de l’humain ; au lieu de contempler le monde et de réfléchir (contempler le moi pour l’abolir), l’homme ne fait qu’agir, « il préfère s’abandonner aux actes […]. » En fait, l’homme aime cette peur qui le fait vivre : « Nous cultivons la frisson de soi, nous escomptons le nuisible, le péril pur […]. » Elle est un « courant psychique » qui traverse la matière, qui la féconde mais aussi la désorganise : c’est la Volonté qui s’effraie de plus pouvoir s’objectiver, c’est le vouloir-vivre aveugle qui pousse l’individu à se préserver coûte que coûte. La peur est donc ce qu’il faut combattre car, bien sûr « elle nous stimule » mais aussi elle « nous empêche de vivre à l’unisson avec nous-mêmes. » La crainte est le principe de la séparation, le principe de non-contradiction : elle ne peut donc se combiner avec l’inerte ou le repos de la béatitude :

Le délivré seul s’en affranchit et fête un double triomphe :   sur elle et sur soi ; c’est qu’il a abdiqué sa qualité et sa tache d’homme, et ne participe plus à cette durée gonflée de terreur, à ce galop à travers les siècles que nous a imposé une forme d’effroi dont nous sommes en définitive, l’objet et la cause. »

Le pessimiste est donc au final celui qui n’a plus peur car il a comprit l’illusion et il a le courage des les affronter pour ce qu’elles sont et ne craint plus de les voir s’écrouler devant ses yeux. Il a accepté de vivre dans les apparences :

Est libre celui qui a discerné l’inanité de tous les points de vue, et libéré celui qui en tiré les conséquences.

Cioran décrit ses états d’angoisse comme des état de “cafard” : il se dit cafardeux :
Fort injustement, on n’accorde au cafard qu’un statut mineur, bien au-dessous de celui de l’angoisse. En fait il est plus virulent qu’elle mais il répugne aux démonstrations qu’elle affectionne. Plus modeste et cependant plus dévastateur, il peut surgir à tout moment, alors qu’elle, distante, se réserve pour les grandes occasions.
Le cafard serait-il simplement notre très actuelle déprime ?

Cet ennui pourrait être vu comme un dandysme, une posture, comme le nihilisme russe dont Cioran s’est pourtant nourri. Ce serait alors un « ennui mal réputé, frivole » qui n’est pas le sien, beaucoup plus essentiel et surtout vécu chaque jour et chaque nuit.
Ce ne sont pas les actes qui font l’homme, mais sa capacité à résister à la volonté d’agir. L’être n’est pas dans l’action, mais dans l’ennui, dans la contemplation passive des heures qui pourrait, si elle était fécondée par la foi, aboutir à la vision mystique de l’Un.
Pour entrevoir l’essentiel, il ne faut exercer aucun métier. rester toute la journée allongé, et gémir.

Le penseur est celui qui, au contraire des péripatéticiens qui élaborent un dogme du devenir, reste dans son lit ou sur son sofa. C’est également contraire à la pratique méditative bouddhique qui a besoin d’une posture précise, qui peut se révéler rude et qui demande un contrôle corporel constant. De l’ennui au fainéant, il semble n’y avoir qu’un interstice que Cioran ne s’amuse même plus à combler. Il n’a effectivement jamais exercé de métier rémunérateur, “alimentaire” comme on dirait aujourd’hui. Notre société actuelle en ferait un parfait assisté, avec ce regard méprisant que la société de loisir où le travail n’est plus une valeur pose sur l’oisiveté. Pourtant, l’ennui est presque une pratique spirituelle, peut-être plus proche de l’idéal antique de sagesse et de vie contemplative, avec, comme toute pratique, un sacrifice, celui de l’acte et du mouvement. Le travail, autre qu’intellectuel et d’écriture, n’est qu’une chimère, et pire, un esclavage. Ainsi se pose la question fondamentale d’un choix de vie et de l’exigence d’une vraie vie humaine : être un humain est-ce travailler, vivre en conformité avec la société et en communauté, faire des enfants, ou bien est-ce chercher à connaitre le monde et soi-même, dans une quête qui doit être la priorité ?

En proie à des préoccupations capitales, je m’étais dans l’après-midi mis au lit, position idéale pour réfléchir au nirvana sans reste, dans la moindre trace d’un moi, cet obstacle à la délivrance, à l’état de non-pensée. Sentiment d’extinction bienheureuse d’abord, ensuite extinction bienheureuse sans sentiment. Je me croyais au seuil du stade ultime ; ce n’en fut que la parodie, que le glissement dans la torpeur, dans le gouffre de la sieste.

Si l’Ennui est la conscience du temps qui passe, il n’est pourtant pas l’appel de la mort, « […] une flamme traverse le sang. Passer de l’autre côté en contournant la mort. » La mort n’est pas attendue ou espérée mais elle n’en demeure pas moins l’inévitable catastrophe de la vie. Il ne s’agit pas d’échapper à la vie, par exemple par le suicide ; et pour échapper à la mort, il aurait seulement fallut ne pas être. Qu’il est doux, alors pour Cioran, ce temps et ce lieu d’avant la naissance, cet Alpha qui ne doit absolument pas effrayer celui qui s’avance vers l’Oméga.

Enfin, l’Ennui est la connaissance d’une absence, celle du sens. C’est une sorte de “blues”, de cafard dit Cioran, du non-sens, une transcendance vers l’immensité de l’irréalité ou encore une union avec l’Absolu de la vacuité.

« Cakya-Mouni, Salomon, Schopenhauer, de ces trois cafardeux […] c’est le premier qui est allé le plus loin […] »

Il s’agit de l’antonyme du sentiment de sublime. Alors, la notion de suicide prend sa véritable couleur, celle d’un gris ridicule, car, pour Cioran, on se tue toujours trop tard. L’Ennui est un sentiment poisseux né de la fatigue de devoir être quelque chose (plutôt que rien) et qui, paradoxalement, fait justement devenir quelque chose de celui qui le ressent. Il existe alors une certitude de l’inutilité à “être” car l’irréel de la journée qui passe, existe seulement dans le néant de l’apathie. L’individu doit alors tenter seulement de maintenir en lui l’équilibre, précaire mais vital pour sa santé mentale, entre les pensées et les émotions. On ressent une angoisse à l’éternel retour du présent : contempler l’instant, puis l’instant, puis l’instant

La perception fataliste de l’être humain

Ecrivant dans les moments de dépression les témoignages de la folie, Sur les cimes du désespoir, Précis de décomposition, Le livre des leurres, Écartèlement ou Le crépuscule des pensées, Cioran transforme son existence en l'analyse inconsciente de la pensée humaine. On peut aisément remarquer en parcourant les lignes de l’ouvrage « Sur les cimes du désespoir », que la sensibilité de ses mots est agonique et l’expression directe est tempéramentale. Il rédige ses aphorismes d’une manière orageuse suivant le graphique d’une impulsion intérieure irrésistible, tenté à chaque instant de dresser un portrait réel de l’être humain, mais il ne réussit qu’à montrer sa vraie nature :

L'homme est un animal qui a trahi, et l'histoire est sa sanction.[30]

Or, la vie humaine a une caractéristique importante. Elle tient à l'essence même de l'humain, à son émergence du monde animal rendue possible par la conscience du soi, du 'il' qu’il est. Par la pensée, par la connaissance, il peut mettre en face de soi l'univers entier. Mais il met alors une distance entre lui et l'autre - distance nécessaire à son identité -, une distance aussi entre lui et la vie et qui fait que sa vie n'est pas végétale ou animale. Cette recherche de l'identité, cette volonté d'être sera aussi l'impasse de son existence.

En effet, si on réfléchit aux choses, on devrait cesser d'agir, de se mouvoir. On devrait se foutre par terre, et pleurer.[31]

D’autre part, la lucidité extrême a un effet corrosif sur la foi, qu'elle soit religieuse ou amoureuse. 'Ne peut-on concevoir une exigence de vérité qui se refuse à toute concession, comme à toute distinction entre normal et maladif?» Nous sommes vraiment vivants dans l'intervalle entre l'inconscience de la santé et le néant de la mort. Nous vivons seulement quand nous mourons la vie, quand elle nous manque et nous marque du vide de l'être.

Nous sommes pour Cioran des êtres malades de vouloir vivre. Nous ne pouvons vivre simplement la vie. 'Pour l'animal, la vie est tout: pour l'homme, elle est un point d'interrogation';

Un animal qui a vu la vie et qui veut encore vivre: l'homme. Son drame s'épuise dans cet acharnement Si nous le faisons, nous témoignons seulement de notre insignifiance spirituelle.  À l'être parfaitement sain psychiquement et physiquement manque un savoir essentiel

Par la maladie, il s'interroge sur la vie, sur sa signification. Mais, son sens ne peut surgir d'elle, car c'est la révélation du non-sens de la vie qui a déclenché l'interrogation sur son sens. Le doute s'installe, envahit tout notre être, et notre vie devient inconfortable.

Par ailleurs, dans la vie effervescente, l'humain s'active semblable à des vagues de la mer qui se croiraient utiles en faisant de l'écume! « Cette vitalité ne constitue guère un obstacle au suicide: tout dépend de la direction qu'elle suit ou qu'on lui imprime. »[33] On appelle 'vie' ce qui n'est qu'un suicide déguisé.

Quand on saisit cela, on comprend que Cioran n'a rien fait, qu’il a cessé de s'activer. On interprète l'aphorisme « on se suicide toujours trop tard » comme une reconnaissance de la raison lucide, une raison distante de la vie et dissociée du désir. Mais on saisit aussi que le suicide et l'idée du suicide sont les seules thérapies véritables, et qu'on ne peut les trouver dans les pharmacies. Qu'y a-t-il de plus triste, disait Cioran, qu'une pharmacie, car elle représente une solution à la maladie et souvent à la vie! Mais nulle pharmacie ne peut vous guérir de votre existence, de votre mal d'être qui est aussi le mal de l'ame étouffant dans le corps. La vie de l'homme est une porte qu'il ne peut pas ouvrir. Toute sa vie, il cherche la clé qui lui permettrait de sortir de lui-même. Et il finira par découvrir avec horreur ou sérénité qu'elle a toujours la forme de la mort! Ce qu'exprimait de façon terrible Vincent Van Gogh dans une lettre à son frère Théo en 1880: « On ne saurait toujours dire ce que c'est qui enferme, ce qui mure, ce qui semble enterré, mais on sent pourtant je ne sais quelles bornes, quelles grilles, des murs [] et puis on se demande: Mon Dieu est-ce pour longtemps, est-ce pour toujours, est-ce pour l'éternité? »

La différence entre le suicide et l'idée du suicide est la différence entre la mort et la vie. Le premier vous guérit définitivement de la vie. La seconde vous la permettez en vous guérissant temporairement de la mort :

La pensée du suicide est une pensée qui aide à vivre [], la vie est supportable uniquement avec l'idée qu'on puisse la quitter quand on veut. Elle est à notre discrétion [] que nous puissions quitter le spectacle quand nous voulons, c'est une idée exaltante. Écoutez, ne soyez pas désespérés, vous pouvez vous tuer quand vous voudrez.

Il faut remarquer qu'une telle lucidité peut faire peur. Elle fait peur à la religion, car elle la détruit. Reconnaitre que ma vie m'appartient dérobe ce qui est censé n'appartenir qu'à Dieu. Je me mets à sa place, ce qui n'a rien d'honorant! Voilà pourquoi la religion condamne le suicide et que la société ne le permet pas. Il est une atteinte fondamentale à l'existence de toute institution. Le paradoxe de l'histoire des religions, c'est que des gens se soient tués si allègrement au nom d'une religion qui ne permet pas le suicide! « Le suicide [] est l'une des grandes idées que l'homme possède. Or, pendant deux mille ans on a empêché les gens de se tuer », dira Cioran en riant.

L'homme est en porte-à-faux par rapport à la vie car il peut déchoir d'elle en la pensant. Ou il se transfigure en la défigurant. Ou il se défigure en la transfigurant. Et il ne peut faire autrement car l'existence de l'humain n'est possible que dans l'existence du « je » qui est celle de la conscience. Il n'y a pas de solution au « je ». Le « je » est l'inscription du paradoxe dans le réel que nulle dialectique ne peut résoudre.

Dans un univers expliqué, rien n'aurait encore un sens, si ce n'est la folie. Une chose dont on a fait le tour cesse de compter.

En s’attaquant à la racine du Mal, de l’Intolérance, du Fanatisme, Cioran poursuit et accomplit un besoin d’expiation, de purification de ses jeunes égarements. La « rage tournée contre soi », la « négativité » se trouvent au cœur de cette écriture centrée sur la condition de l’homme moderne et qui réfléchit sur celle de l’écrivain dans une société de plus en plus politisée, de plus en plus divisée, de plus en plus radicalisée. La « poétique du détachement » qui illustre cette première étape de création prend déjà contour dans le Précis de décomposition (Exercices négatifs à l’origine) que Cioran publiera en 1947 et s’articule non seulement autour de la  dénonciation de toute forme de dogmatisme ou d’intransigeance, mais aussi autour de l’écriture éclatée, fragmentaire, opposée, dira Cioran, à « la tentation de conclure ». Cette écriture fragmentée, fracturée est une expression de la modernité dans la mesure où la philosophie, le premier amour de l’essayiste, est, estime-t-il, incapable d’expliquer le monde ou le temps, qui mesure plutôt l’irrationalité contemporaine, le volet culturel de la durée, la fracture de la connaissance, du moi, la décomposition de la pensée et la décadence du Verbe.   

Cette étape créatrice du métèque correspond à un métissage esthétique, autrement dit à l’éclatement de la forme littéraire, dont le principal matériau, la langue, se dissout et s’incarne sous diverses formes : le doute se radicalise et se détache du discours philosophique impersonnel et systémique. Aux idées abstraites, Cioran, devenu « penseur d’occasion », préfère la connaissance empirique; l’écrivain est un sceptique déçu par la philosophie (universitaire ou non), un moraliste qui, avant d’observer les gens, doit « dépoétiser sa prose ».



Sur les cimes du désespoir, Paris, Gallimard, 1948, 45

Cioran, Emil. Oeuvres, Paris, Gallimard, 1995, p. 1470

Entretien avec Jean–François Duval, dans Cioran, Entretiens, Paris, Gallimard, 1995 : 52 – 53

Cioran, E, La Transfiguration de la Roumanie, l’Ed. De l’Herne, 1990

Cioran, E, Le livre des leurres, Ed. De l’Herne, 1990

La première lettre, non datée et la quatrième, du 22 déc. 1930 à son ami Bucur Tincu, dans Cioran, 12 scrisori de pe cumile disperarii, insotite de 12 scrisori de batranete, Dosar ingrijit de Ion Varic, Cluj, Ed. Biblioteca Apostrof, 1995 : 19,20, 34

Cf. Deuxième lettre à Bucur Tincu, op. cit : 57

Cioran, E, Revelatiile durerii, eseuri, Cluj, Ed. Echinox, 1990 : 92, 93

Schopenhauer, Arthur, Le monde comme volonté et représentation, Paris 1873

Cioran, E, Ed. Gallimard 1973 p.

Ibid, 30

Ibid, 40

Cioran, E, De l’inconvénient d’être né (Gallimard 1973 p.134)

Schopenhauer, Arthur, Le monde comme volonté et représentation, Paris 1873

Ibid (p. 761)

Ibid (p. 394)

Ibid (p. 396)

Ibid (p. 406)

Ibid (p. 456)

Cioran, E, De l’inconvénient d’être né (Gallimard 1973 p 245)

Ibid, p 150

Ibid, p 171

Schopenhauer, Arthur, Le monde comme volonté et représentation, Paris 1873, p 51

Cioran, E, De l’inconvénient d’être né (Gallimard 1973 p 165

Ibid, p 121

Ibid, p 176

Cioran, E, Aveux et anathèmes, Galimard, 1987, p 45

Ibid, p232

Ibid, p 234

Cioran, E, De l’inconvénient d’être né (Gallimard 1973 p.78)

Ibid, p 109

Ibid, p 154

Ibid, p 143

Ibid, 179

Ibid, 67



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